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Tadake Kyoshiro
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Jeu 11 Juil - 20:24
Le Parrain
 PV Lidy Olsen | Grand Line

             




Dans chaque homme résidait un guerrier qu'il ne tenait qu'à lui d'écouter ou non, le bretteur avait compris et accepté cette réalité depuis bien longtemps jusqu'à en faire son credo. Il était conscient qu'en lui résidait une rage sourde, un potentiel pour la violence présent chez tous ses congénères et, plutôt que de la laisser l'envahir et contrôler ses pensées, il avait décidé d’emprunter la voie du samouraï afin de canaliser cette puissance pour en faire quelque chose de bien. Dans sa prime jeunesse il avait été un garçon calme et doux, ce qui ne lui avait rendu la tâche que bien plus difficile car, avant de maîtriser cette puissance guerrière qui sommeillait en lui, il avait dû la réveiller et ce ne fut pas une mince affaire. Oh oui son jeune corps gardait la trace des coups pris afin de réveiller la bête qui était en lui et, à présent, une décennie plus tard, le candide était parvenu à maîtriser très correctement le guerrier qui sommeillait en lui.
Correctement mais pas parfaitement, la main qui tremblait au-dessus du manche de son sabre en était le triste écho, symbole de la faiblesse mentale qui caractérisait le bretteur. Il n'avait pas peur en cet instant, savait qu'il vaincrait cette bête mais, pour autant, le guerrier en lui hurlait sa volonté d'être le premier à faire couler le sang. Il fallut des efforts dantesques au jeune homme pour maintenir cette lutte constante à sa seule main, pour rester maître de lui-même malgré la vision de cette bête qui approchait de lui.
Il campa donc sur ses positions, maintenant sa posture d'attente évidemment agressive afin de dissuader de faire un pas de plus. Puis, lorsque la bouche de la bête s'ouvrit devant lui, affichant ses crocs comme autant de lames à lui opposer, le guerrier en Kyoshiro s'éveilla totalement, agrippa le manche de son sabre avec une fermeté rare chez lui. L'épéiste s'élança et, alors que la bouche de la bête s'étendait vers lui, alors que sa propre lame s'extirpait de son fourreau, il fut pris d'un doute. Non, pas un doute mais un écho du Kyoshiro originel, celui pour qui l'idée d'ôter une vie était tout bonnement impensable.

Il était toujours là, encore et toujours là malgré les années si bien qu'il parvint à imposer sa volonté. Son bras trembla, hésita et bientôt son coup se désintéressa de la tête de la bête pour se pencher vers son flanc gauche qu'il vint caresser en un éclair. Si la bête se vautra que l'autre flanc, sentant sa chair ouverte et le liquide qui s'en échappait, le jeune épéiste posa un genou à terre alors que sa main lâchait prise sur son sabre, laissant l'arme tomber à terre avant que la fin ne vienne se poser sur son épaule gauche de laquelle s'écoulait du fluide vital par plusieurs orifices. Il avait douté et la bête avait eu le temps de le croquer, maudissant de nouveau sa propre faiblesse tout en gardant la douleur derrière sa mâchoire fermée.

Rien de tout ceci ne se serait passé en d'autres circonstances. Tout ceci était de sa faute, pour avoir baissé sa garde.

Empoignant son sabre avec sa main libre, serrant les dents en sentant une vague de douleur marteler son bras gauche, le samouraï se redressa avant de poser un regard courroucé en direction de la bête. Ce regard ne dura pas plus de deux secondes son horrible erreur, avoir pris cet animal pour une menace qui ne cherchait véritablement que sa mère. Cette lueur de fureur disparut aussitôt pour faire place à une tristesse et culpabilité évidentes, contraignant le guerrier à rengainer son arme alors que ses pas le menaient en direction de la bête.
Kyo serra les dents tout en posant un genou à terre, presque à deux mètres de la bête qui peinait à se relever. Il observa la blessure de la bête qui touchait sa patte avant-gauche et son flanc, réalisant qu'il aurait pu faire bien pire s'il l'avait vraiment voulu.


 « Désolé. On est quittes maintenant, d'accord ?   »

De sa main libre il pointa son épaule meurtrie et sa chemise qui virait désormais à l'écarlate, avant de laisser un petit silence s'installer. La bête pourrait bondir sur lui à tout instant, aussi il lui laissa quelques courtes minutes de répit pour s'habituer à sa présence, avant de faire un pas de plus dans sa direction.


 « Laissera-tu l'homme qui t'a fait du mal te remettre sur pieds ?  »

C'était bien la seule chose qu'il pouvait faire pour le moment, car il peinait à maîtriser la tempête qui faisait rage dans sa tête. Il ne pouvait penser à Lidy, pas comme cela, pas maintenant et se devait donc de fermer les cloisons de ses émotions afin de retrouver temporairement son professionnalisme. Si la bête se laissait faire, alors le jeune homme se débarrasserait de sa chemise – mettant ainsi sa blessure à nu – avant de la poser sur la blessure de la créature pour stopper le sang d'en couler. La porterait-il à bout de bras, pour la mener ailleurs, si la future mère en faisait la demande ? Probablement.

En faisant fi de sa propre douleur. Comme toujours.


   
   
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Lidy Olsen
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Lun 15 Juil - 23:47

Le Parrain [14]


Le regard de la Olsen se porta, horrifié sur le corps meurtri du guerrier qui la protégeait. Elle eut quelques gouttes qui commencèrent à se former au bord de ses yeux tandis qu’elle obligeait son fauteuil roulant à parcourir les quelques mètres qui la séparaient de Kyoshiro. Certes, elle tremblait encore mais son corps était capable de se mouvoir, amplement. La Bête, assiégée par une multitude d’émotions et de contradictions, semblait accepter difficilement l’acte attentionné de l’homme. Elle n’avait d’yeux que pour Lidy dont l’existence même semblait être au centre de la sienne. C’était l’odeur de cette femme que la Bête adoptait.

- On dirait qu’elle… veut que je m’approche.

La jeune femme ressentait à présent ses intentions. Les blessures qu’elle avait subies l’avaient calmée. La créature elle-même était issu d’une hybridation de différentes espèces du Nouveau Monde, ce qui voulait dire qu’elle était instable mais… Non, cela voulait aussi dire qu’elle n’avait pas encore d’identité propre. La Olsen pouvait comprendre ce sentiment d’être recluse. Se levant difficilement de la chaise roulante qu’elle venait de bloquer, la demoiselle aux cheveux bleus observa Kyoshiro faire preuve une nouvelle fois de toute l’humanité dont il était capable.

Brusquement, la future maman s’approcherait en titubant avant d’arriver au niveau de la bête la rattraperait avec son flanc. Elle fermerait les yeux, paisiblement, avant de s’endormir. Le sang continuait de couler, la condamnant si rien n’était fait… Et autour d’eux, les regards effrayés indiquaient que personne ne leur viendrait en aide. Personne. Lidy eut une sueur froide en comprenant qu’ils étaient encore trop enfermés dans leurs propres microcosmes.

- Aidez-la… aidez-la ! Dit la jeune femme en tentant de se relever, les larmes aux yeux.

Elle ne pouvait rien faire. « Aidez-la » suppliait-elle aux regards qui se détournaient. Puis vint un mouvement, le mouvement d’une personne qui s’était détachée et qui sortit d’une boutique en ramenant des linges pour arrêter la blessure, et de l’eau pour la bête. On reconnut le visage de Margareth Lawless. Elle avait été touchée par l’épéiste, et voulait honorer son choix. Finalement, cette créature semblait tout aussi démunie que le reste des personnes présentes ici-bas.

Le geste de l’écrivaine sembla en animer d’autres, et bientôt une demi-dizaine de personnes se mêla aux efforts collectifs. Tandis que la future maman fut remise dans son fauteuil roulant, et qu’on lui imposa de se diriger à l’écart, certains prirent en charge l’épéiste en désinfectant ses blessures et en l’obligeant à se tenir tranquillement. Certes, pour s’assurer de la sécurité de tous il fallut donner un sédatif à cette bête mais c’était un moindre mal. La Olsen sourit, le regard animé par un espoir, celui qu’elle ne mettrait pas ses enfants au monde dans un univers cruel et dénué de sens, celui qu’ils auraient l’occasion de rencontrer des gens désintéressés, ou d’inspirer d’autres personnes qu’eux-mêmes.

Quelques dizaines de minutes passèrent ainsi, avant qu’une autre surprise ne commence à se faire voir… Une surprise assez étonnante. Hypnos arrivait, légèrement guillerette. Son arcade au niveau de l’œil droit avait été légèrement ouverte, mais elle avait déjà mis un pansement après s’être recousue toute seule. Son regard semblait cependant amener des nouvelles intéressantes, et elle fit signe à Kyoshiro et à Lidy de la rejoindre une fois que l’épéiste eut fini ses soins.

- Alors, comme ça on ne se tient pas tranquille ? Fit la vampire sur un ton de reproche en fixant la bleue. Tu...

La Olsen avait retenu depuis déjà quelques minutes les larmes qui s’apprêtaient à couler. Finalement, c’en était trop, trop d’émotions, trop de peur, trop de stress accumulé des mois durant. Trop de tout, finalement, puisqu’elle se sentait incapable de protéger ses enfants. Soudain, les larmes se mirent à couler, à l’étonnement sincère de Hypnos qui n’avait jamais vu ce phénomène chez la Olsen.

- Je suis… désolée… Kyoshiro… je suis désolée… Je suis désolée…

Elle pleurait tout en séchant ses larmes, déformant ses traits tandis que son nez commençait à couler. Elle s’excusait, elle s’excusait de s’être mise en danger, de l’avoir mis en danger, et finalement pendant un long moment ses pleurs ne furent plus que des excuses qu’elle s’adressait à elle-même, qu’elle adressait à ses enfants, qu’elle adressait à Heziel qu’elle avait exclu en se disant, en se promettant qu’il n’aurait jamais besoin de la protéger, alors qu’aujourd’hui son étreinte chaleureuse lui manquait. Elle sentait un vide, un vide que personne ne pouvait combler.

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Tadake Kyoshiro
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Mar 16 Juil - 1:08
Le Parrain
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Tomber et se relever, faire des erreurs et les réparer, tel était la façon dont le jeune homme apprenait ce que cela voulait dire d'être vivant, chaque jour qu'il passait à explorer ce vaste et étrange monde. Aujourd'hui il avait laissé son côté guerrier et protecteur prendre le dessus mais il avait agi trop tard, il était passé à un cheveu de voir sa protégée mourir entre ses bras ou du moins était-ce ce dont il était convaincu en voyant la bête s'approcher d'elle. Mais une fois encore il avait eu tort, une fois encore il avait laissé son instinct prendre le dessus sans réfléchir et, en plus d'avoir échoué comme garde du corps, il avait aussi blessé une créature qui semblait désormais bien plus innocente. Combien de temps continuerait-il de la sorte, à échouer encore et encore et encore ? Cela devait cesser, il devait arrêter de laisser ses émotions prendre le pas sur son bon sens comme son maître le lui avait appris jadis.

Bon dieu, ce que cela était plus facile à dire qu'à faire. Surtout pour un homme tel que lui.

Il sentit donc la belle arriver juste derrière lui mais n'eut ni le courage ni l'envie de la regarder ou lui répondre, totalement incapable de croiser son regard sans rejouer cette scène dans sa tête, encore et encore. Que se serait-il passé s'il avait été chercher Hypnos jusqu'au bout ? Aurait-il trouvé un corps sans vie à la place d'une future mère brisée ? Se le serait-il pardonné ou jour ? Non, bien sûr que non. Des samouraïs s'ôtaient la vie pour moins que cela, il le savait et avait eu peur de devoir recourir à une telle extrémité. Il laissa donc les curieux venir, s'approcher et prendre soin de la belle tandis que d'autres, avec la meilleure volonté du monde, l'aidaient déjà à désinfecter sa blessure. De cet aide il n'en voulait pas, il ne le méritait pas et, quand une de ces personnes s'approcha de lui avec quelques linges en guise de pansement de fortune, il prit le tissu et repoussa poliment ces braves âmes d'un geste de la main.


 « Ça va aller, merci. Occupez-vous d'elle, plutôt.   »

Puis arriva Hypnos et ce fut le moment où Lidy s'écroula véritablement, s'excusant auprès de l'épéiste qui, pour la première fois, ne sut trouver les mots. Il tendit une main vers la concernée, pour la poser sur son épaule mais se ravisa à la dernière seconde, ferma le poing avant de le poser sur son épaule toujours douloureuse. Le visage fermé, tentant de plonger dans son conditionnement mental pour retrouver son calme, il se tourna vers la vampire avant de lui demander de s'occuper de sa protégée pendant un instant.


 « Tu peux t'occuper d'elle, s'il te plaît ? Ce ne sera pas long.  Je... »

Il aurait voulu dire qu'il n'était pas doué pour réconforter les autres mais c'était faux, ses mots étaient sans doute la plus douce arme de son arsenal mais aujourd'hui c'était différent. Aujourd'hui il n'avait pas le cœur à réconforter qui que ce soit parce qu'il avait failli à sa mission, Il était un échec à tel point qu'il ne pouvait regarder la future mère dans les yeux et celle-ci pourrait le sentir, car si il était en colère contre elle ce n'était sans aucune comparaison avec la culpabilité et la déception qui l'accablaient.


 « Non, rien. »

La mâchoire fermée, il fit quelques pas pour s'éloigner de la petite foule avant de passer le linge tout autour de son épaule et, lorsque vint le moment de serrer le bandage, une vague de souffrance généra un grommellement de douleur qu'il tenta de garder derrière ses dents. En vain.
Il avait mal mais continuerait d'avancer malgré tout, car il le fallait. Rattraper son erreur était le moins qu'il puisse faire. Ainsi, il se détourna difficilement de la mère en pleine détresse, convaincu qu'elle serait plus en sécurité entre les mains de la vampire qu'entre les siennes, le samouraï s'approcha de la bête et s'accroupit devant elle pour évaluer son état général.


 « Est-ce que quelqu'un peut m'indiquer où se trouve le vétérinaire le plus proche ? Il s'agirait de la recoudre, et vite.    »

Une fois les premiers soins effectués et la plaie propre, le jeune homme passerait ses deux mains au-dessous du thorax de la bête avant de la soulever. Assurément ce geste généra une autre vague de douleur qu'il ne put retenir, avant de serrer les dents tout en sentant une seconde souffrance plus diffuse et continue venir lacérer son bras. Mais non, il ne laisserait personne d'autre porter cette créature à sa place.

Il avait échoué, avait frôlé la catastrophe et soigner cette créature était sa façon à lui de se pardonner. Quant à la future mère, il ne méritait pas de trouver les mots pour elle car il était la cause de sa souffrance. Elle était en détresse et il le savait, elle avait besoin de soutien et il le savait mais il...ne méritait pas de le lui donner. Hypnos saurait trouver les mots tandis que lui souffrirait, laissant son épaule meurtrie lui rappeler ce qu'un manque de vigilance pouvait causer.

Décevant. Il était décevant.

   
   
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Le Parrain [15]


Il avait fui, et s’il avait approché sa main celle-ci n’avait servi à rien. Laissant la jeune femme en compagnie de Hypnos, la vampire ne savait pas plus que l’épéiste comment réagir. Elle se tortilla dans tous les sens en tentant de trouver « la » réponse, « la » bonne phrase… En vain. En vain, car il n’y avait rien qu’elle put dire que la bleutée ne comprenne. Ainsi, pendant de longues minutes les sanglots continuèrent tandis que Kyoshiro pouvait emmener la bête à une vétérinaire, qui se situait au nord de la ville. Finalement, la vampire choisirait de tenir la Olsen dans ses bras pour tenter de calmer ses pleurs, silencieusement. Les larmes étaient le berceau de sa tristesse, et tandis qu’elles dansaient sur ses joues, asséchant leur source minute après minute, une mélodie en provenance du centre de la ville où un troubadour tentait de réconforter les foules viendrait s’apposer, doucement.

Quelques minutes supplémentaires, et Lidy arrêterait de pleurer. Elle avait mal à la tête, mal partout, et ne rêvait que d’une chose : rentrer. Acquiesçant sans dire un mot, la vampire remettait la jeune femme sur son fauteuil roulant avant de la diriger, tranquillement, en direction de leur maisonnée. Elle savait que Kyoshiro obtiendrait gain de cause auprès du vétérinaire. Margareth, elle, avait disparu pour s’occuper de ses propres affaires. Elles n’étaient finalement plus qu’elles deux, comme au commencement.

- Tu veux qu’on aille faire un tour ? Demanderait finalement la femme aux yeux carmin après des dizaines de minutes de silence.
- Ca va aller… Je veux juste dormir, à présent.

Elle ne voulait pas la stresser, mais Lidy devait déjà commencer à y penser, maintenant le stress amoindri. En effet, quelque chose d’important était à prendre en compte : si des personnes les avaient trouvées, c’est que d’autres risquaient de venir très prochainement. Cela signifiait changer d’endroit, par mesure de précaution. Et dire qu’elle espérait accoucher ici… C’était dommage. Pourtant, un autre voyage en mer serait sûrement compliqué… Qu’allaient-elles choisir ? Une chose pourrait motiver leur choix :

- Un homme m’a attaqué à notre maison. Je me suis réveillée, et je l’ai hypnotisé pour obtenir des informations… Il a juste eu une mission et rien n’a été communiqué. Ce qui pourrait les mettre sur notre piste, c’est cette affaire de monstre mais…
- Ce n’est pas un monstre,
soupira la Olsen. Juste une créature qui a été arrachée à son monde. J’aimerais l’aider.

Elle avait séché ses larmes, et le rouge de ses yeux commençait à s’estomper, pourtant on savait encore qu’elle avait pleuré pendant de longs instants. En retournant vers la maison, elles acceptaient de pouvoir s’éloigner de Kyoshiro, mais le sabreur les rejoindrait sûrement sur la route. La Olsen tenterait un sourire rassurant, pour lui faire comprendre qu’elle allait mieux. Elle toucherait son ventre, inquiète.

Il fallait espérer que la bête aille bien, mais c’était surtout ses enfants qui préoccupaient Lidy. Il n’y avait heureusement eu aucun choc. S’ils arrivaient à la maison avant que l’épéiste n’arrive, ce qui serait surprenant, ils verraient des pieds dépasser de derrière la maison. La Olsen ne demanderait rien, et Hypnos se contenterait de raffermir sa prise sur le fauteuil. Elle avait obtenu les informations et après… Et bien elle avait fait ce qui était nécessaire. Pas de pitié pour ceux qui en voulaient à ses futurs neveux ou nièces.

Finalement, ils pourraient se poser quelques instants, expliquant la situation à Kyoshiro : ceux qui recherchaient Lidy les avaient trouvés. A présent, il fallait choisir. Partir, ou rester, en sachant qu’ils auraient sûrement un laps de temps assez court pour se décider. S’ils partaient, ils ne prendraient que l’essentiel et feraient brûler la maison… S’ils restaient, ils devaient envisager une stratégie de défense.

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Mar 16 Juil - 21:13
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Fuir n'était pas dans ses habitudes, pas dans sa nature profonde mais aujourd'hui, sentant la perdition le gagner, il avait décidé de ne pas aller au bout de son geste par peur de ce vers quoi il pourrait mener. Le devoir avait toujours été prioritaire par rapport à sa propre vie, il en allait de même pour tous les pratiquants du bushido, mais aujourd'hui il avait échoué dans cette mission parce qu'il s'était montré trop doux. Il aurait pu se donner la mort pour ce déshonneur, mais tout au fond de lui subsistait une fois lui intimant de faire le contraire, de sauvegarder sa vie pour continuer de servir un jour de plus.
Il parvint enfin à résister et, plutôt que de prendre la belle dans ses bras comme son cœur le voudrait, l'épéiste choisit la voie du devoir et se ferma comme une huître, attrapant la bête avant de se diriger vers le vétérinaire le plus proche. Bien entendu le praticien accueillit Kyoshiro avec des yeux comme des queues de pelle mais, après une intense discussion et une garantie que la bête ne ferait pas du praticien son futur repas, le professionnel accepta de s'occuper de bête. Il aurait voulu rester là, dans la salle d'à côté, à attendre que la bête soit recousue mais combien de temps cela pourrait-il prendre ? Malgré cette nouvelle mission qu'il s'était donné il n'oubliait pas pourtant sa quête originelle, celle de la protection d'une future mère en détresse.


 « Je vous la confie. Je reviendrai prendre des nouvelles de son état.   »

Le praticien ne chercha pas à débattre davantage et laissa le jeune homme s'en aller, lui rappelant tout de même au passage qu'il ne travaillait pas gratuitement. Oubliant cette notion d'argent en un claquement de doigts, le jeune homme se dirigea vers la maison où devaient être rentrées Hypnos et Lidy. En chemin il s'arrêta pour s'acheter une chemise, ayant jeté l'autre pour panser les plaies de la malheureuse bête, avant d'accélérer le pas pour enfin voir ces deux formes familières se dessiner devant lui.  
Laissant son bras gauche pendre le long de son corps, préférant éviter les mouvements brusques pour laisser à son épaule meurtrie le temps de se reposer, il pénétra lentement dans la maison avant de laisser immédiatement son dos reposer contre le premier mur venu. Il écouta Hypnos et Lidy lui expliquer la situation, lui expliquer la proximité du danger car quelqu'un connaissait désormais sa position et que cette maison n'était plus du tout sûr. Il n'eut pas besoin de l'entendre pour sentir ce choix arriver, sentir cette décision qu'il devrait prendre car il avait la sécurité du groupe entre ses mains, celle de fuir le danger ou rester et lui faire face.
Y avait-il seulement un véritable choix ? La belle ne serait pas vraiment en état de se déplacer avec intensité et, pour l'autre option, rester était l'assurance de voir les pires individus débarquer devant cette porte. Peut-être que jadis Kyoshiro aurait choisi la fuite plutôt que l'affrontement mais aujourd'hui c'était différent, aujourd'hui il ne se permettrait pas d'échouer de nouveau.


 « Il ne vous arrivera rien .   »

Ce ton était froid et sec, celui de la machine qui venait de se mettre en marcher, celui du guerrier qui nettoyait son esprit en vue de la prochaine bataille à venir. Ses émotions avaient failli mener à la catastrophe, il allait donc les laisser de côté pour le moment afin de retrouver les sommets de concentration qu'il était capable d'atteindre.


 « Vous pouvez dormir tranquilles. Je me ferai seppuku plutôt que de laisser quelqu'un s'approcher de vous.    »

Il s'avança vers la table et y ramassa bandage et adhésif qu'il avait laissé là, afin de panser proprement sa plaie cette fois. Lorsque le jeune homme leva la tête avait de faire demi-tour les deux femmes purent le voir, voir ce visage et cette mâchoire plus fermés qu'il ne l'avaient jamais été, cette posture massive du guerrier qui s'échauffait à peine, cette posture d'homme pour qui son devoir important beaucoup plus que sa propre existence.


 « Reposez-vous bien.   »

Sans un mot de plus, l'homme attrapa de quoi se panser avant de sortir sur la terrasse. Il irait s'asseoir et, s'il ne voyait venir personne, il enlèverait sa chemise pour panser proprement cette morsure qui continuait de le lancer terriblement. Et si quelqu'un venait ? Il en ferait de même car, s'il n'était peut-être pas le plus pudique du monde, il savait que remettre en état son épaule était autrement plus important que son éventuelle tenue.
Demain il recommencerait à s'entraîner à un seul bras, pour laisser à l'autre le temps de se remettre. Et après ? Après il attendre de voir la menace arriver, il ne fuirait pas.

   
   
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Le Parrain [16]


Lidy sentit une tristesse immense l’envahir quand elle réalisa que son erreur avait coûté beaucoup plus cher à Kyoshiro qu’à elle-même. Il s’était renfermé comme une huitre alors qu’ils commençaient à établir un contact amical. La jeune femme à la chevelure bleutée ferma les yeux en imaginant clairement les conséquences que cela pourrait avoir, et elle s’interdit de verser une nouvelle larme. Il fallait qu’elle rétablisse les scores… mais pas aujourd’hui, elle en aurait été incapable. Sa fatigue prenait le dessus, et elle accepta tant bien que mal d’aller se reposer. Hypnos la conduisit alors vers sa chambre, la laissant dans son lit, endormie profondément.

La vampire s’avança en direction du salon. Sa tambouille avait été complètement foutue en l’air. Heureusement, elle allait pouvoir se reposer tranquillement à présent… Enfin, c’est ce qu’elle aurait aimé, mais l’épéiste était mort de fatigue le matin même, alors s’il faisait une autre nuit blanche, il allait s’écrouler sur place. Même lui avait ses limites, et sans les comprendre il risquait d’y perdre la vie. Soupirant, la jeune femme se dirigea vers la terrasse où siégeait déjà l’épéiste.

- Kyoshiro… Merci d’avoir aidé Lidy aujourd’hui. J’ai eu un moment d’inattention…

Elle se flagellerait plus tard, il y avait plus important ici. Finalement, elle observerait la blessure du sabreur avec une certaine pointe de regret. Il allait falloir désinfecter et panser la plaie correctement. C’était vrai que cela n’entrait pas dans les prérogatives normales d’une ancienne hors-la-loi, mais elle s’y connaissait bien en médecine. La demoiselle se dirigea vers son nouveau camarade, arborant un air relativement tyrannique. Cette fois-ci, il n’allait pas s’en sortir à si bon compte.

- Laisse-moi faire. Je vais panser ta plaie. Ne t’en fais pas pour Lidy, mes sens ne me tromperont pas deux fois.

S’il posait plus de questions, elle lui expliquerait que son ouïe était plus développée que celle des humains. Elle n’hésiterait pas avant de s’emparer des bandages et d’aller chercher une solution pour désinfecter. Elle observerait les plaies et recoudrait ce qui devait l’être avec une dextérité qu’on était obligé de lui reconnaître. Pendant ce temps, elle aurait tout simplement drogué le système de l’épéiste pour l’obliger à s’endormir, à se reposer. Ainsi, à son réveil elle lui expliquerait clairement pourquoi elle avait fait cela…

Le lendemain matin, que Kyoshiro ait été pris dans le piège ou non, la Olsen se réveillerait avec un air plus fatigué encore que la veille. Elle avait l’air de s’inquiéter, et son inquiétude était clairement dirigée vers l’épéiste. Ce dernier avait été blessé par sa faute, une bête avait été blessée par sa faute… Ah, elle s’en voulait terriblement, et ça ne l’aidait clairement pas. Ainsi, s’asseyant à la table du petit-déjeuner, elle tenta de se satisfaire de la lecture d’un petit roman qui lui avait attiré l’œil récemment. Elle aurait bien aimé repartir avec le livre de Margareth Lawless, la veille, mais… Peine perdue, il avait été égaré dans toute cette histoire.

Soupir aux lèvres, elle entendit soudain quelqu’un toquer à la porte. Lorsqu’elle verrait la personne entrée, si elle y était autorisée, ses yeux s’écarquilleraient : « Quand on pense au loup, on en voit la queue » se dit la demoiselle en souriant devant l’arrivée de son autrice préférée.

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Mer 17 Juil - 18:09
Le Parrain
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On pourrait croire que les samouraïs étaient une caste d'élite prédestinée à vivre une existence guidée par le devoir et la droiture, des hommes façonnés mentalement par la voie du sabre depuis leur plus tendre enfance mais cela ne pouvait être plus éloignés de la vérité. En effet au cours de leur entraînement ils parvenaient à façonner corps et esprit afin d'accueillir les enseignements de leur maître, de cela au moins nous pouvons être d'accord, mais il serait erroné de dire que tous les samouraïs avaient d'évidentes prédispositions. En effet, si vous prenez le jeune homme dont je vous conte l'histoire, par exemple, il est important de souligner qu'il avait eu une vie avant de mettre les pieds dans ce dojo, une vie que rien ne destinait à la froideur de l'acier qu'il portait désormais à sa ceinture. Il était avant tout un garçon joyeux et expressif, un garçon qui souriait  à la face du monde et, s'il était parvenu aujourd'hui à enfermer ses émotions pour reprendre un masque de froide concentration, ce procédé n'avait rien de naturel pour lui et cela pouvait presque se lire sur son visage.
Il luttait. Luttait pour décoincer sa mâchoire, pour autoriser ses émotions à filtrer à travers ses dents mais il ne put s'y résoudre pour le moment, craignant que la culpabilité ne vienne le submerger s'il avait le malheur ne serait-ce que d'ouvrir un tout petit peu les vannes. Il se réfugia donc sur la terrasse où la vampire vint le rejoindre et, lorsqu'elle évoqua sa déconcentration temporaire, le jeune homme répondit par un hochement de tête négatif.


 « Ce n'est pas toi qui est à blâmer. »

Pas besoin d'en dire davantage, ses yeux en disaient bien plus que  toutes les paroles du monde. Le seul à blâmer ici c'était lui et personne d'autre, il ne laisserait aucune de ses hôtes lui dire le contraire aussi longtemps qu'il aurait à charge de les protéger. Lorsque la vampire proposa de soigner ses blessures, le jeune homme défit sa chemise sans hésitation avant de rebondir sur le dernier morceau de la réplique de sa camarade du moment.


 « Je ne la laisserai plus hors de ma vue, plus jamais. »

Il resterait éveillé aussi longtemps qu'il le faudrait, il s'entraînerait encore et encore jusqu'à ce que son corps tombe en lambeaux mais il ne se laisserait plus jamais surprendre. Du moins était-ce l'idée qu'il avait en tête avant que son esprit ne se brouille, avant qu'il ne soit contraint à plonger dans le pays des songes jusqu'au petit matin. Il se réveilla en trombe, torse nu et trempé de sueur, réalisant à peine qu'il avait stupidement fermé les yeux avant que la vampire ne lui explique sa part de responsabilité dans cet événement.
Elle s'inquiétait pour l'état de fatigue du jeune homme, pensant qu'une trop grande fatigue viendrait diminuer sa vigilance et ses capacités, ce qui était une réflexion des plus logiques, mais le samouraï tint tout de même à lui préciser quelque chose d'important.


 « Je sais que tu veux bien faire, mais ne le refais pas. Je suis parfaitement conscient des limites de mon corps, crois-moi.»

Il choisissait simplement de les ignorer, tels étaient les mots qui restèrent coincés dans la gorge du jeune homme qui se ravisa finalement. À quoi bon le dire, puisque cela tombait sous le sens ? Il n'était pas homme pour qui la modération était familière, choisissant de faire les choses à fond ou de ne pas les faire du tout en dépit de sa forme physique ou mentale. Oui peut-être qu'il finirait par s'écrouler de fatigue à force de se priver de sommeil, une option à ne pas écarter, mais il était plus que prêt à mettre sa santé en danger pour qu'une tragédie comme celle de la veille ne se reproduise pas.
Sa vie importait peu comparée à celle de la future mère. Vraiment très peu.

Alors que le soleil commençait à peine à  montrer le bout de son nez, alors que la future mère n'était pas encore éveillée, Kyoshiro se réfugia de nouveau sur la terrasse et, faisant quelques pas pour se retrouver devant la maison, il empoigna un de ses sabres avant de répéter les mouvements qu'il connaissait par cœur. Combien de temps resta t-il à s'épuiser ainsi ? Des minutes ? Des heures ? Il n'aurait su le dire mais bientôt il s'arrêta, laissant son torse s'affaisser et se gonfler sous l'effet d'une respiration rapide, alors que la célébrité de la veille faisait de nouveau son apparition. Il le prononça pas un mot, pas un seul commentaire avant de rengainer son arme et revêtir sa chemise sans pour autant la boutonner.

Lentement, silencieusement, il ouvrit la porte pour laisser la célébrité rentrer. Il ne dirait rien mais ses yeux glacés en disaient long sur sa volonté à ne plus perdre Lidy de vue. Il viendrait s'asseoir dans une chaise dans un coin de la pièce, son arme reposant tout contre son épaule droite, tout en observant la scène.

Il ne serait pas le samouraï que la future mère souhaitait, mais bien le samouraï dont elle avait besoin.
   
   
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Sam 20 Juil - 11:24

Le Parrain [17]


« Il pense trop » se dit la Olsen en observant le samouraï au coin de la pièce. C’était certainement la plus grande marque de dévouement qu’on n’ait jamais fait preuve à son égard, et pourtant ils se connaissaient à peine. La jeune femme était opposée à le laisser dans ce simple rôle de garde du corps. Quelques mois plus tôt, elle l’aurait fait. Elle n’aurait pas hésité comme avec l’aveugle qui était venu à son secours… Aujourd’hui c’était différent. Ses émotions étaient de nouveaux le plus grand vecteur de sa pensée, contrairement à la raison qui était passée au second plan. Le seul élément qui l’empêchait d’évoquer ses émotions sur l’instant était la présence de Margareth Lawless.

L’écrivaine était venue pour discuter, ou du moins c’est ce qu’elle laissait croire. En réalité, elle avait des informations que la Olsen lut au moment où elle entra dans la pièce. C’était des informations assez capitales, puisqu’elles permettraient de comprendre comment l’homme au masque à gaz était arrivé jusqu’à eux. D’ailleurs, une fois qu’elle eut pris des nouvelles de Kyoshiro et de Lidy, la jeune femme ne s’attarda pas sur les sujets les plus éparses :

- J’ai interrogé le libraire hier, il me semblait suspect en quittant la salle de lecture… Il avait reçu la veille le signalement de Lidy, et devait contacter des « autorités » si jamais elle venait à être repérée. Bien sûr, il pensait bien faire en contactant des marines, mais il s’est avéré que c’était ceux qui vous ont attaqué hier…

Elle avait eu connaissance de l’homme au masque à gaz par Hypnos qui, en repartant de la ville, avait tenté de savoir si l’écrivaine avait vu quelque chose. Lidy se maudit intérieurement de ne pas avoir été plus prudente : elle aurait dû sonder les pensées de cet homme. C’était une plaie que de se dire qu’elle avait été vendue par quelqu’un qui croyait bien faire. Il fallait qu’elle se ressaisisse. Fermant les yeux, elle imagina calmement les nouveaux scénarios qui pouvaient se dégager de cette situation. Le voyage était-il moins périlleux que de rester ici ? Elle en doutait, ils allaient devoir prendre un navire civil et…

- Margareth, dîtes-moi… Comment êtes-vous arrivée sur l’île ?
- Tu peux me tutoyer, et je suis venue en transport personnel. Je possède un petit équipage et une caravelle, pourquoi donc ?


Hypnos se leva brusquement. Elle acquiesça intérieurement en se disant la même chose que la Olsen. Le voyage en mer était dangereux, certes, mais il l’était moins que de rester ici. Les ennemis qu’ils pouvaient se faire étaient nombreux, et les journalistes pulullaient déjà dans la ville. La créature serait bientôt sur pieds, ou du moins elle aurait fini de voir ses blessures se faire recoudre. Se tournant vers l’épéiste, la jeune femme semblait déjà avoir fait son choix. Elle allait aller contre ce que Kyoshiro désirait en premier lieu, si Margareth acceptait de leur prêter le gite.

- J’aimerais quitter l’île. Des personnes me poursuivent, et il faudrait que nous partions discrètement d’ici.

L’écrivaine sembla réfléchir tranquillement à la demande. Elle n’envisageait pas de la refuser, mais il fallait qu’il y ait le confort suffisant pour la future maman. De même, il faudrait qu’elle fasse mettre en place suffisamment de sécurités… Et ce qui l’inquiétait le plus, c’était l’accouchement. Cependant, à cela, Hypnos pourrait répondre qu’elle était tout à fait capable de mettre au monde des enfants. Elle pouvait être sage-femme sans aucuns soucis.

Finalement, elle opina du chef pour indiquer qu’elle était tout à fait d’accord avec ce que la bleue demandait. Elle regarda Kyoshiro pour voir s’il avait quelque chose à redire, observant sa silhouette musculeuse. Elle appréciait bien ce jeune homme, et elle tenterait bien sa chance avec ce caractère mystérieux et sombre s’il venait à… Oh, pas de pensées impures, Lidy stoppa sa lecture en fermant les yeux et en se frottant les paupières.

- Je pars demain, vous avez le temps de préparer vos affaires, si vous décidez de venir. Kyoshiro, il faudrait que tu penses à une manière discrète d’amener Lidy sur le navire, dit l’écrivaine s’il acceptait le voyage. Nous devrions atteindre une autre île d’ici… Peut-être cinq ou six jours.

Cela serait un temps de voyage assez raisonnable. En tout cas, pour Lidy, ça le semblait.

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Sam 20 Juil - 19:53
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Certains disaient qu'il n'y avait pas de pire adversaire au monde qu'un guerrier à la fierté et à l'honneur bafouée, ce qui pouvait sans doute être le cas dans certaines situations, mais ces fameuses personnes ne devaient jamais avoir été en face d'un samouraï dont le devoir pendait d'un côté ou de l'autre du fil. Ces adeptes de la voie du bushido étaient d'un tout autre monde, d'une toute autre caste pour laquelle les prouesses martiales n'étaient qu'un moyen d'accomplir leur devoir et non pas imposer leur supériorité à autrui, car les samouraïs n'étaient tout simplement pas faits pour se battre pour eux et eux seuls. Leur but, leur seule existence finissait toujours par les guider dans l'ombre d'un seigneur à servir, d'un but à atteindre, d'une cause à défendre et, si jamais ces samouraïs venaient à faillir à leur mission et qu'ils décidaient de ne pas se donner la mort pour se racheter, ils devenaient des machines guidées par un seul but : la rédemption.
Le Kyoshiro présent dans un coin de cette pièce n'avait presque plus rien en commun avec l'homme qu'il était devenu aujourd'hui, il n'avait pas encore été suffisamment brisé par la vie pour se forger une carapace aussi solide que le granit marin et, pourtant, il avait déjà à l’époque un conditionnement mental qui lui permettait de rester concentré même lorsque la tempête faisait rage autour de lui. Il n'était pas le plus féroce ou le plus inventif des combatif, assurément pas, mais dans toutes les mers il n'y avait personne qui soit aussi concentré sur sa mission et prêt à tout sacrifier pour la mener à bien.

S’entraîner deux fois plus, trois fois plus, dix fois plus que tous les autres : telle avait été sa manière de grandir au fil des années et, de mémoire d'homme, jamais il n'avait manqué ses entraînements ne serait-ce que pour un seul petit jour. Pourquoi ? Parce que la continuité des efforts était la base de toute progression, il savait aussi bien que n'importe qui et avait simplement poussé ce concept à l'extrême, poursuivant ses efforts jusqu'à ce que son corps ne soit plus en mesure de suivre la cadence. Lorsque la célébrité entra dans la pièce le jeune homme ne se montra pas bavard du tout et, si la belle observait bien, elle verrait un changement évident chez le jeune homme : plus concentré, plus froid, mon expressif. Pourquoi ? Parce qu'il était un samouraï qui avait failli tout perdre, perdre son honneur et son devoir, perdre sa dignité et sa raison de vivre : parce qu'il était un adepte du bushido ayant laissé ses émotions prendre le pas sur son devoir.

Il n'y avait pas pire faute que celle-ci, pour un homme de cette caste guerrière.

Il resta donc immobile et silencieux pendant que le célébrité énonçait l'évidence, que la future mère avait été localisée et qu'il n'était plus qu'une question de temps avant que d'autres ne viennent à sa poursuite. Kyoshiro le savait, il n'était pas bête et ne donc pas surpris lorsque Lidy énonça l'idée qu'elle avait en tête. Des ennemis proches, une situation précaire et instable, n'importe qui d'autre à sa place aurait voulu fuir cet endroit comme elle l'annonça à présent, se tournant vers Kyoshiro qui lui rendit un regard neutre. Dans ses yeux brillait une lueur de désapprobation évidente, compte tenu de la condition de la demoiselle, mais il y avait autre chose dans ces prunelles de feu, une pincée de...d'acceptation ? Oui, car ce n'était pas le rôle d'un samouraï que de discuter les ordres de son seigneur mais simplement faire tout pour qu'ils soient remplis. Oui il n'approuvait pas ce voyage mais n'en dirait rien, réduisant à néant ses idées et pensées personnelles alors que la célébrité lui demandait de trouver une solution pour transporter Lidy jusqu'au navire.

La transporter discrètement ? Plus facile à dire qu'à faire car avec son fauteuil roulant la belle n'était pas très discrète, mais il devrait faire son maximum pour que le trajet jusqu'au navire se passe sans encombre. Le reste ne dépendrait plus de lui, tout du moins jusqu'à ce qu'ils arrivent à l'île suivante qui serait leur prochain foyer.


 « Très bien, je me charge de l'amener jusqu'au navire.»

Il n'avait aucune envie de jouer la subtilité, de chercher les meilleurs subterfuges pour parvenir à transporter la belle sans encombre. Il l'amènerait directement au port pas des routes secondaires et isolées, dépeuplées, là où seuls des individus mal intentionnés sauraient peut-être le trouver et ensuite...ensuite...il ne ferait pas dans la dentelle. Que ces hommes servent d'exemple pour ceux qui suivraient, pour les dissuader de poursuivre la traque et sauvegarder leurs propres vies.

Ainsi, se levant de sa chaise, hochant discrètement la tête en guise de prise de congés, l'homme ouvrit la porte avant de s'adresser aux trois personnes présentes.


 « Je vous laisse vous préparer et vous reposer, pour demain. Je retourne m'entraîner. »

Que pouvait-il faire d'autre, à part tourner en rond tel un lion en cage ? Il devait être au meilleur de sa forme et, si son épaule gauche serait un handicap certain pour lui, il avait appris à manier son sabre aussi bien à une qu'à deux mains et saurait donc se débrouiller en temps voulu. Une fois sur la terrasse, il extirpa son arme de son fourreau et la positionna juste devant lui, verticalement, la pointe dirigée comme pour toucher les cieux, avant de fermer les yeux pour faire le ménage dans son esprit.

Demain c'était le grand jour, le jour de tous les dangers, le jour où Lidy atteindrait une sécurité bien méritée. Le jour où le sens du devoir de Kyoshiro serait une fois encore mis à l'épreuve. Le jour où il n'échouerait pas, assurément pas.


 « Le devoir ou la mort, comme disait le maître. »


   
   
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Lun 29 Juil - 11:00

Le Parrain [18]


Comme à son habitude, Kyoshiro se montra relativement laconique. Il n’était pas dans ce déferlement de paroles et d’émotions qui faisait tort à certains. Lui avait la mesure des paroles et de leur sens, et le ton sec qu’il employait ne laissait pas de place au doute : il accomplirait sa mission, quoiqu’il en coûte. Fut-ce la vie d’un camarade ou la sienne, d’ailleurs… Et si c’était remarquable, la Olsen ne souhaitait pas être au centre d’une agitation qui pourrait lui donner des pensées noires. Elle espérait, intimement, qu’aucun bandit ne viendrait se mettre sur leur chemin. Et la nuit commença à passer.

Hypnos observait les alentours avec prudence : elle avait amené déjà une partie des bagages jusqu’au navire de l’écrivaine, en toute discrétion. Elle s’était aussi assurée que l’équipage n’allait pas les trahir en les hypnotisant les uns après les autres. Sa présence était un plus pour l’équipe : elle avait déjà écarté les bandits de grand chemin qui pourraient leur faire de l’ombre sur les sentiers qu’ils emprunteraient. En quelques heures, Hypnos avait fait ce qu’elle faisait dans le monde souterrain : le ménage. Ses aptitudes n’avaient pas faibli, et même si elle était loin d’être à sa forme la plus olympique, son corps tout entier était toujours capable de prouesses.

Quelques heures passeraient encore pendant lesquelles la future mère de famille serait en train de se reposer, les yeux fermés, l’esprit vagabondant. Ses pensées seraient tournées vers une absence : celle de Heziel. Il lui manquait, il lui manquait terriblement. Pas un contact depuis tout ce temps, seules quelques lettres qu’elle avait écrites avec ses mains frêles et démunies. Elle se sentait incapable d’agir correctement. A vrai dire, être enceinte la mettait en situation de danger, et si Hypnos jouait aujourd’hui les sages-femmes et les amies, c’était loin d’être suffisant pour la garder en sécurité. Même Kyoshiro avait prouvé ses limites… Et qu’il était capable de les dépasser. Elle priait intérieurement pour que les choses soient plus simples dans le futur.

A quoi bon tenter le diable si celui-ci était déjà entré ? La Olsen se posait cette impertinente question en se réveillant. Durant un instant, le visage de Heziel lui apparut devant les yeux. Elle se les essuya alors pour constater qu’il s’agissait d’une illusion. Ses lèvres se fermèrent, et elle se mordit les lèvres. Son corps tout entier agissait, crispé. Elle ferma les yeux.

- C’est vraiment le p…

Elle n’eut pas le temps de finir sa phrase que déjà la porte de sa chambre s’ouvrait et que la vampire y entrait. Elle avait tout préparé pour le trajet, y compris le fauteuil dont les roues avaient été changées pour pouvoir s’adapter en terrain. Ce serait sûrement plus confortable aussi : il avait quand même fallu qu’elle fasse des mains et des pieds pour en arriver là. La bleue lut dans les pensées de la vampire son parcours du combattant, et la remercia intérieurement. La nuit n’avait pas été reposante. Son dos lui faisait mal, tandis que son ventre était noué. Elle s’obligea à manger tout de même, pour trois.

- Nous allons pouvoir rejoindre le navire, dirait-elle à Kyoshiro. Je te remercie vraiment pour tout ce que tu fais pour mes enfants et moi.

Elle plaçait ses enfants en premier. C’était sa priorité. S’il fallait choisir, elle les choisirait eux, pas elle. Lorsque le temps passerait, elle remarquerait sûrement que cet amour ne ferait que se renforcer au point d’en devenir une obsession. Quelques dizaines de minutes plus tard, ils quitteraient la maison pour se diriger vers le navire. Y aurait-il des problèmes sur la route ou se passerait-elle bien ? En tout cas, l’itinéraire choisi était dégagé de tout obstacle.

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La plupart des guerriers avaient besoin d'une activité qui permettait de les calmer, de faire la paix dans leur esprit afin de pouvoir rassembler leurs pensées et, pour plusieurs de ces castes guerrière, la méditation était la forme la plus répandue de ce qu'on pourrait appeler un repos mental. Elle permettait de se forcer à l'immobilité pour atteindre un point de concentration et de zénitude absolue, un calme qui était très propice au ménage mental qui avait lieu juste après, généralement juste avant une bataille d'importance majeure. Kyoshiro avait toujours été d'un naturel calme et posé, aussi n'avait-il que rarement eu besoin d'un tel exercice mais, comme tous ses compagnons, il avait jadis était introduit à ce concept de méditation dont il eu du mal à comprendre l'intérêt.
Pourquoi ? Parce que d'aussi loin qu'il s'en souvienne il n'avait jamais été plus serein et en possession de ses moyens qu'en sentant le manche d'un sabre entre ses mains, qu'en sentant la caresse du froid métal contre sa peau, qu'en ressentant le poids d'un sabre entre ses mains. Pourquoi ? Parce que son sabre était une extension de son propre bras et, ensuite, parce que c'était au travers de la répétition de mouvement et par un effort intense prolongé que le jeune homme arrivait à ressentir un niveau de concentration rarement acquis par ses congénères. Certains y avaient là une marque du prodige, d'un génie qui était véritablement né pour sa voie du sabre mais Kyoshiro avait toujours balayé ce compliment d'un revers de main, insistant sur le fait que chacun était capable d'arriver à son nouveau pour peu qu'il s'en donne les moyens.
Il n'avait rien d'un génie, rien d'un prodige n'apparaissant qu'une fois par génération, rien d'un guerrier de légende dont les histoires vantées les faits d'armes. Il était simplement acharné, plus tenace qu'une tique, plus implacable qu'un prédateur captant l'odeur de sa proie : une machine parfaitement bien huilée. Il avait fait une erreur de jugement et avait révisé son jugement quelques courts instants plus tard, convaincu qu'il lui fallait éliminer les émotions de l'équation s'il voulait mener sa mission à bien.

Ainsi, n'ayant pas le cœur à la méditation et l'immobilisme, son bras gauche toujours allongé le long de son corps, Kyoshiro empoigna son sabre de la fin de soirée jusqu'au petit matin, en s'arrêtant en de très rares occasions pour essuyer ses mains trempées de sueur ou resserrer le bandage de son épaule, répétant encore et encore les mêmes exercice. Il était fatigué et sentait son énergie s'amenuiser petit ç petit, comme des grains de sable glissant entre ses mains, mais sa mission était autrement plus importance que sa santé. Qu'à cela ne tienne,  il profiterait du voyage par bateau pour fermer l’œil cinq minutes, pas plus, car il ne pouvait voir comment Lidy pourrait être en sécurité s'il ne veillait pas au grain.

S'essuyant et passer un peu d'eau sur son visage, pour nettoyer la sueur et se donner le temps de retrouver son souffle, afin de ne pas arriver épuisé devant ses protégées, Kyoshiro put enfin enfiler sa chemise noire et tourna sa tête lorsque la belle s'adressa à lui pour le remercier. Le remercier de quoi ? D'avoir foiré ? D'avoir stupidement succombé à ses douces paroles ? La remerciait-elle pour n'avoir pas été fiable et professionnel ? Son visage sembla presque regagner un peu de sa douceur passée jusqu'à ce que le bretteur regagne ses esprits, rassemblant ses pensées pour répondre à la belle sur un ton neutre, dans laquelle la fatigue se ressentait sans mal.


 « Ce n'est pas nécessaire. Vraiment pas. »

Il ne méritait pas de remerciements et n'en attendait d'ailleurs jamais, n'agissait jamais sans attendre quelque chose : ainsi était le samouraï. Il s'empressa donc de recouvrir la belle d'une larme cape avec capuche, afin de masquer son visage, la mettant dans son fauteuil avant de débuter sa cours jusqu'au port. Cette fois-ci il ne s'arrêta pas pour regarder le décor, pas pour laisser sa curiosité prendre le pas sur son bon sens et, en moins de temps qu'il ne fallut pour le dire, il arriva jusqu'au port.


 « Nous sommes arrivés. Je t'amène jusqu'à tes quartiers.  »

Quelques minutes plus tard la belle était embarquée jusqu'au pont du navire, le jeune homme emmenant son bolide jusqu'à la modeste chambre qui avait affrétée pour la future maman. L'épéiste resta un instant sur le pas de la porte, ne trouvant pas quoi dire pour renouer le contact, pour dissiper ce froid qu'il avait lui-même installé et, échouant à trouver un sujet à aborder, tourna les talons. Puis cela le frappa au moment où son dos dépassait l'encadrement de la porte : pourquoi simplement ne pas le lui dire, en faisant fi des convenances ? Elle ne semblait pas particulièrement fermée d'esprit, non ? Alors pourquoi hésiter ? Son poing gauche se ferma le long de sa jambe, avant que ses mots ne parviennent à traverser ses dents pour parvenir aux oreilles de Lidy.


 « Plus jamais.  Plus jamais tu me refais ce coup-là, promis ? »

C'était une question sans vraiment en être, la future mère saurait très bien de quel événement il était mention et saurait deviner que l'épéiste n'accepterait pas de refus. Il se tourna enfin vers elle et, en lieu et place de la froideur des braises éteintes, la future-mère trouverait dans les prunelles de son protecteur une lueur de tristesse que tous les conditionnements mentaux n'arrivaient pas à repousser indéfiniment. La raison de cette tristesse ? Elle ne tarda pas à se faire connaître. Une fois cette explication donnée il partirait sur le pont, laissant Lidy de reposer car elle en avait bien besoin


 « Tu dois sans doute savoir comment les samouraïs rachètent leur déshonneur, leur échec. »

Était-elle consciente que Kyoshiro pourrait se donner la mort si elle était imprudente de nouveau ? Si elle imposait un nouvel échec sur les épaules de son gardien ? Savait-elle que le devoir représentait tout pour le jeune homme, que ce n'était en rien une passade qui lui était arrivée comme une envie de pisser ? Servir était toute sa vie, la raison-même de son existence et, s'il devait aller plus loin, la mère devrait être consciente de jusqu'où son samouraï était prêt à aller. Si elle ne connaissait pas les coutumes de cette caste alors il lui expliquerait simplement le principe de seppuku, cette mise à mort rituelle dans laquelle un guerrier s'ôtait sa propre vie pour racheter ses fautes.

Il n'aimait pas jouer aux chantages affectifs, telle n'était d'ailleurs pas son intention envers la belle mais, s'ils devaient aller plus loin, le candide devait au moins expliquer une nouvelle fois ce qui était en jeu ici. Peut-être que cette femme se ficherait bien de sa propre vie, c'était son droit le plus strict, mais par ses paroles transpiraient la volonté du samouraï de ne pas se faire avoir une seconde fois. De ne plus risquer le déshonneur pour servir les caprices d'une femme qui allait bientôt avoir fort à faire.

Il appréciait cette jeune femme, vraiment. Une raison de plus de ne plus prendre de risque, car il n'avait aucunement hâte de rencontrer la lame avec laquelle il s'ouvrirait le ventre.

Vraiment pas.

   
   
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Tadake Kyoshiro
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Lidy Olsen
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Mar 22 Oct - 12:35

Le Parrain [19]


- Le long voyage qui s’annonçait allait être décisif dans l’avenir de ces enfants. Les péripéties qui continueraient à s’écouler viendraient mettre en péril la jeune mère, et mettraient à l’épreuve le samouraï au grand cœur.

Fermant le livre, Hypnos observa les trois enfants qui, étalés dans leur grand lit, s’étaient endormis. La petite fille était étalée en étoile, à l’image d’un des deux garçons. Le dernier baillait timidement, se réveillant par intermittence pour regarder qu’il n’était pas seul. Cette peur de l’abandon, c’était normal quand on n’avait pas connu ses parents. Seule la marraine veillait sur eux, connaissant l’existence de ces enfants. Elle bailla elle-aussi, se dirigeant vers sa chambre pour se coucher à son tour.

Elle n’avait jamais maudit Lidy pour lui avoir donné cette charge. Au contraire, élever ces enfants avait été l’accomplissement de toute une vie. Jamais elle n’avait été aussi heureuse que devant ces petits êtres qui l’appelaient « Tata ». Ils avaient beau être jeunes, ils étaient très conscients de l’absence de mère. Ils allaient à l’école du village comme tout le monde, et pouvaient voir la différence avec les autres enfants qui étaient amenés par leur père ou par leur mère. Le chef du village n’avait cependant jamais posé de question, et une quiétude s’était installée, doucement.

Leur histoire préférée était celle de la Truande et du Héro. C’était l’histoire de leur naissance, même si elle ne l’avait jamais dit ainsi. En l’écrivant, deux ans plus tôt, Hypnos avait cherché à préparer les enfants au retour de leurs parents. Aujourd’hui encore, elle ne désespérait pas.

En ouvrant la porte de sa chambre, elle observa une lampe à huile allumée et une personne posée dans un fauteuil, non loin. Elle fronça les sourcils avant de soulever l’un d’entre eux. La demoiselle qui était posée là avait les cheveux noirs comme la nuit, et le regard sanguin. Elle ne la connaissait pas, ce qui n’était somme toute pas rassurant. S’apprêtant à sauter à la gorge de cette inconnue, elle arrêta en la voyant tendre une lettre, silencieusement.

Elle s’en saisit, avant de sourire doucement devant l’écriture qui était dessus. Une larme coula le long de sa joue, et elle reposa son regard sur le fauteuil, à présent vide. Les choses allaient commencer à bouger, elle en était certaine.

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