Je ne m’étais jamais autant ennuyée. Ca faisait un long moment que mon exploitation était en marche et les choses marchaient au mieux, mais tout restait des plus stables. La plupart des gens d’ici ont déjà entendu parler de la Bouchère, mais je n’étais qu’une criminelle parmi les autres sur cette île malfamée. J’avais envie de changement, de renouveau, de tester des nouvelles choses, mais c’était bien difficile.
Ce jour-là, je n’avais aucune commande, personne qui ne nécessitait mes services. De plus, ma dernière assistante s’était fait tuer, il me fallait donc trouver quelqu’un d’autre pour pouvoir retourner dans ma routine habituelle. J’enfilai ma tenue de ville, à savoir une simple tenue noire sur laquelles le “K” de mon nom était inscrit un peu partout, et je me dirigeai en ville, marchant là où mes recherches me mèneraient. Comme d’habitude, j’attirai les regards de beaucoup de personnes. Certains se demandaient probablement pourquoi une jeune fille cornue se baladait seule parmi les criminels, d’autres devaient me regarder avec appétit tel les prédateurs qu’ils étaient, mais je restai sur mes gardes.

Ma marche fut étrangement longue, ne trouvant personne digne d’intérêt. Habituellement, je jaugeais les gens à leur tête, cherchant des personnes ayant l’air fort physiquement, mais ne respirant pas la haine aux plus profond de leurs yeux. Malheureusement, je n’en avais trouvé aucun, me contentant de croiser des faiblards ou des bandits transpirant la violence. Malgré tout, je n’abandonnai pas, ne voulant pas prendre le risque de devoir moi-même faire les liens avec les clients.

Après de nombreuses heures, j’arrivais au niveau du port, un endroit où je n’étais presque jamais allée. Approchant de la mer, je me surpris à admirer les beaux reflets du soleil sur l’étendue bleue qui dominait l’horizon. Je ne savais pas pourquoi, mais cette eau me rendit mélancolique, me faisant songer à tous les malheurs que j’avais vécues sur cette île. Mon père, ma mère, mes assistants, j’avais toujours tout perdue et j’étais toujours seule. Était-ce ma faute ou celle de l’île ? Je m’installai sur une bitte d’amarrage tout en me posant cette question, essayant d’y répondre en vain.

Le temps passa, assise, lorsqu’une silhouette sembla se dessiner au loin. Était-ce un bateau ? Est-ce qu’il y avait vraiment encore des personnes qui étaient suffisamment folles pour faire escale sur Himitsu Shima ? Cependant, c’était une bonne opportunité pour moi après tout. Ca faisait des heures que je m’interrogeais sur ma vie, mais je ne risquais pas de réussir à changer les choses en restant immobile et inactive. Non, il me fallait explorer de nouveaux horizons, voir si la vie était différente sur le reste de la planète et ainsi pouvoir étendre l’influence de mon nom. Qui sait, peut-être même qu’en-dehors de cette île, certain seraient prêts à croire que je suis réellement la Bouchère ? Mes yeux ne s’arrêtaient pas de fixer la caravelle qui approchait, pétillant de joie. Il ne fallait maintenant plus qu’attendre qu’elle s'amarre pour essayer d’y embarquer.

Descendant de sa caravelle, un homme plein d’assurance, probablement un musicien vu son instrument, qui se ramena à mon niveau, me proposant de l’argent pour lui faire visiter. L’argent ne m’intéressait pas tant, cependant, il me proposa une offre bien plus intéressante : celle de quitter l’île. Même si j’étais très attaché à ce lieu, il fallait avouer que l’ennui devenait beaucoup trop présent ; j’étais entrée dans une inlassable routine et je ne désirais qu’une seule chose : retrouver ma grande sœur. Oui … c’était peut-être finalement le moment pour moi de quitter mes racines, découvrir le monde pour voir ce qu’il aurait à m’offrir, constater toutes les destructions que nous pourrions engendrer avec Némésis. Oui, j’allais probablement accepter cette offre. Observant l’homme, un grand sourire aux lèvres, je finirais par lui répondre.

“ - Ça me va, mais je n’ai pas besoin d’argent, contentez-vous de me payer une glace au marchand et je vous fais tout visiter. Restez juste sur vos gardes, aucune rue n’est sûre ici !”

Comme pour appuyer mes mots, j’indiquerais un marchand de glaces non loin vers lequel je me dirigerais. Après avoir obtenu mon délice glacé, je commencerais à marcher vers les habitations, faisant la présentation tout en léchant toutes les cinq secondes mon dessert.

“ - Je ne sais pas ce que vous connaissez d’Himitsu Shima, mais sachez simplement que cette île est sous le joug de Konan, c’est l’homme le plus puissant de l’île et probablement de toute cette voie de Grand Line. On ne le croise presque jamais car il est souvent occupé, mais il est la branche principale de tous les commerces et les gangs d’ici. Sur cette île, personne n’est fiable, tout le monde est un criminel et il faut se méfier de tout le monde. D’ailleurs, j’espère que vous avez laissé des gens sur votre bateau sinon il risque de se faire piller en moins de deux, c’est fréquent avec les commerçants. Si vous aimez tout ce qui est illégal sur le reste du monde, vous êtes au bon endroit, on peut tout acheter ici tant qu’on a les moyens, même des esclaves si on a ça en réserve. Qu’est-ce que je pourrais vous dire d’autres pour ici … “

Je me mettrai à réfléchir, me grattant la tête. Soudainement, j’eus une révélation : la grande salle de combat !

“ - Un des lieux les plus populaires ici c’est la Salle de Combat, je peux vous y amener si vous désirez. Là-bas, il y a des paris sur des combats à n’importe quelle heure de la journée et de la nuit. On peut faire des combats classiques ou à mort. J’ai déjà participé à plusieurs combats à morts, mais on m’a banni du ring car c’était trop facile pour moi et qu’on me disait que je trichais, du coup je me contente d’y aller comme spectatrice et de récupérer les corps de ceux qui meurent au combat.”

Je parlais avec une assurance totale, comme si la mort faisait entièrement partie de mon quotidien, au point de devenir une banalité comme une autre, ce qui pourrait venir poser quelques questions à l’homme. Cependant, mon visage ne trahissait aucune autre émotion que l’amusement.

“ - Évidemment qu’il faut se méfier de moi, je suis comme tout le monde ici, je survis grâce à la loi du plus fort. Cependant, tu ne devrais pas avoir à craindre quoi que ce soit si tu es gentil, je ne dépouille les organes que de ceux qui sont méchants avec moi.”

Alors que je continuais à avancer, observant chaque habitation dans les environs à la recherche de celle qui pourrait être la plus intéressante, profitant de chaque occasion pour donner un coup de langue sur ma glace, l’homme à mes côtés finirait par me demander quelque chose de plutôt atypique. L’homme finirait par demander mon nom ainsi que des endroit plus intéressant selon ses goûts, il me fallait lui répondre, question de politesse.

“ - Moi je m'appelle Kira, je suis une chirurgienne sur cette île. Tu désires …. jouer de la musique ? Hmm…. oui, je connais un endroit où les gens pourraient être intéressés, ils adorent ce qui sort de l’ordinaire. Par contre, tu as intérêt à être doué, sinon tu risques de te faire poursuivre par plusieurs brutes !”

Toutes joyeuse et satisfaite de l’idée que j’avais eue, je finirais par me diriger en bordure de la ville vers une taverne un peu spéciale,assez peu fréquenté mais dont les clients les plus réguliers appréciaient la distraction. Cependant, je les avais déjà vu une fois tabasser des danseurs qu’ils estimaient nuls. Poussant les portes en bois de cette dernière, j’adresserais un regard à l’homme du nom de Raki avant de lui indiquer la marche à suivre.

“ - Tout ce que tu as à faire c’est t’installer sur cette petite scène en bois et faire ce que tu désires. Si tu es suffisamment bon, peut-être que d’autres tenteront leur chance et te rejoindront. Dans le cas contraire, ils tenteront de mettre fin à ta vie mais ne t’inquiète pas, je viendrais t’aider !”

Le sourire toujours aussi dressé, je viendrais m’installer sur un siège, le regard dirigé vers Raki. J’avais décidément très hâte de voir ce qu’il avait à proposer.

Installé sur une des chaises au bar, j’observais attentivement ce Raki. Il avait l’air particulièrement sympathique et je me réjouissais d’avance de pouvoir observer ce dont il était capable. Autour de moi, les clients commençaient d’avance à ricaner de cet inconnu qui grimpait sur la scène, certains commandant dors et déjà un cocktail “Musicos”, une spécialité locale qui ne se boit pas mais qui se jette sur les artistes incompétents.

Un son dissonant sorti de la guitare de l’homme, serait-ce une provocation ? Ou une invitation à ce que tout le monde écoute ses mélodies ? En tout cas, il avait réussi à attirer l’attention de tous les lieux, il n’avait pas intérêt à faire la moindre fausse note sous peine de repartir plus humide et puant qu’un chat sortant des égouts. Finalement, la musique commença et ce fut une surprise générale dans toute la salle. Des gens battaient des pieds au rythme de la musique, les gens déposaient leurs cocktails, des chuchotements se faisaient entendre de partout concernant la qualité de sa musique. Moi-même je devais reconnaître qu’il était doué, ça changeait grandement de ces incapables qui ne savent pas chanter et qui ressassent en boucle des musiques de pirates obsolètes.

Sirotant mon jus de fruit, je pourrais observer la grande rage lorsqu’il déclamait ses paroles, mais elles étaient également le signe d’une grande passion. Me tournant légèrement vers le patron, je lui ferais une commande.

“ - Tu peux me mettre deux mojito s’il te plait ? Un pour moi et l’autre pour le chanteur.”

“ - T’es pas un peu jeune pour ça ?”

“ - Je t’ai pas demandé ton avis, contente toi de me servir !”

Le barman soupirait avant de finalement me servir. L’avantage de vivre sur une île de criminel était bien le fait de pouvoir outrepasser certaines règles d’âge concernant les boissons alcoolisées. Bien que n’était pas une grande fan de ces dernières, j’adorais me faire des mojitos spéciaux…

Une fois les verres face à moi, j’userais de mes pouvoirs pour déverser de l’azote liquide à l’intérieur de ces dernières, laissant apparaître à l’intérieur de la boisson une légère couche de fumée. Quand Raki aurait terminé de chanter, je lui aurais fait signe de s’approcher.

“ - C’était génial ! Pour te remercier de cette super chanson, je t’offre une de mes boissons préférées ! Tu verras, c’est rigolo, ça te fait souffler de la fumée par le nez ! Par contre, je te conseille de la boire tout doucement sinon tu vas mourir.”

Comme pour démontrer mes propos, j’apporterais le verre à ma bouche, buvant quelques gorgées avant de recracher par les narines une épaisse fumée blanche.